En perpétuel changement
Notre corps compte 100 000 milliards de cellules qui sont de 250 types différents (cellules de la peau, du sang, du cœur, neurones, etc.). Si on les mettait toutes bout à bout, on aurait un joli ruban de quelque 15 000 km de longueur. Plus du tiers de la circonférence de la Terre !
Non seulement nous abritons dans notre corps une gigantesque communauté cellulaire, mais nous sommes aussi en perpétuel changement. Chaque seconde 810’000 cellules sont remplacées (1). En quinze ans, notre corps est pour ainsi dire totalement régénéré, mais la plupart de nos cellules sont neuves tous les dix ans. Notre organisme est donc conçu pour se renouveler en permanence. C’est un processus naturel et constant.
Ainsi, les cellules de la cornée à la surface de l’œil n’ont besoin que de 24 heures pour se régénérer. Quatre jours au plus pour la paroi du côlon et la muqueuse du tube digestif. Une semaine pour la paroi de l’estomac, huit jours pour le tissu pulmonaire et un mois pour changer (littéralement) de peau. Nos os eux-mêmes se renouvellent de 10% chaque année et, selon les études, notre cœur a changé entre la moitié et trois fois (2) au cours d’une vie.
Le donneur qui a offert la moitié de son foie pour une transplantation le verra entièrement régénéré en… huit semaines ! (3). Cela peut être encore plus spectaculaire, comme l’explique le professeur Henri Joyeux : « Après une intervention chirurgicale enlevant jusqu’à 80 % de la masse hépatique totale (1500 grammes, soit 2 % du poids du corps), les 20% restant sont capables de régénérer complètement et donc de reconstruire en 6 mois tout le foie à partir de ce qu’il en reste. » (4)
La plasticité du cerveau
Notre cerveau est constitué de 84 milliards de neurones auxquels s’ajoutent un nombre à peu près identique de cellules non-neuronales (5). Pendant très longtemps, on a pensé que notre cerveau restait figé une fois arrivé à l’âge adulte et que nous étions condamnés à perdre peu à peu nos neurones sans possibilité de remplacement. On sait depuis les années 1970 que cette vision est fausse et que notre cerveau créé en permanence de nouvelles cellules neurales. Un neurone est d’ailleurs remplacé chaque seconde. (6)
En tout temps, le cerveau peut créer de nouvelles connexions synaptiques, réorganiser des réseaux neuronaux et créer de nouveaux neurones en fonction de nos besoins et de notre environnement. Le corollaire de cette bonne nouvelle, c’est que pour gagner des neurones, il faut les faire travailler ! Les curieux, les avides de connaissances de toutes sortes sont les plus à même de voir leur cerveau se développer.
Le Dr Eleanor Maguire a ainsi mené son enquête auprès de chauffeurs de taxi londoniens. Elle a pu prouver en utilisant l’imagerie magnétique que les personnes appartenant à ce corps de métier avaient leur hippocampe postérieur dans chaque hémisphère cérébral plus développé que celui de la majorité des gens. Sachant que cette zone est impliquée dans le stockage de la représentation spatiale et de la navigation spatiale, le résultat n’est finalement guère surprenant. (7). Cette capacité de notre cerveau à se “recâbler” est aussi utilisée pour vaincre certaines phobies très handicapantes en parfois seulement un mois . (8)
L’être humain a donc bien plus de ressources physiques qu’il ne l’imagine généralement. Il est fort dommage que cette excellente nouvelle ne soit pas systématiquement enseignée dans nos écoles qui apprennent encore trop souvent aux élèves que le cerveau ne se régénère plus après avoir passé le cap de la vingtaine d’années.
Tableau des durées de régénération
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Alexandra Urfer Jungen
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Bianconi, E., Piovesan, A., Facchin, F., Beraudi, A., Casadei, R., Frabetti, F., Perez-Amodio, S., “An estimation of the number of cells in the human body”, Annals of Human Biology, 40 (6), 2013, pp 463-471
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Laflamme, M.A., Murry, C.E., “Heart regeneration”, Nature, 473 (7347), 2011, pp 326-335
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Nadalin, S.. Testa, G. Malago, M., Beste, M., Frilling, A., Schroeder, T., Broel-sch, C.E., “Volumetric and functional recovery of the liver after hepatectomy fot living donation”, Liver Transplantation, 10(8), 2004, 1024-1029
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Site officiel du Professeur Henri Joyeux, “Les cellules de nos organes : un feu d’artifice de différences”, 20 août 2014, https://professeur-joyeux.com/2014/08/20/les-cellules-organes-feu-dartifice-differences/
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Azavedo, F.A., Carvalho, L.R., Grinberg, L.T., Farfel, J.M., Ferreti, R.E., Leite, R.E, Herculano-Houzel, S., “Equal numbers of neuronal and nonneuronal cells make human brain an isometrically scaled-up primate brain”, Journal of Comparative Neurology, 513(5), 2009, pp 532.541
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Walloe, S., Pakkenberg, B. & Fabricius, K, “Stereological estimation of total cells numbers in the human cerebral and cerebellar cortex”, Frontiers in Human Neuroscience, 8, 2014
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Maguire E. Gadian, D.G., Johnsrude, I.S., Good, C.D., Ashburner, J, Frackowiak, R.SJ., Frith, C.D.” Navigation-related structural change in the hippocampi of taxi drivers », https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC18253/
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Paquette V. Lévesque J, Mensour B, Leroux JM, Beaudoin G., Bourgouin P., Beauregard M., « Change the mind and you change the brain : effects of cognitive behavioral therapy on the neural correlates of spider phobia »,Neuroimage, 18, 2003, 401-409
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Dawson Church, Ph.D., De l’esprit à la matière, comment les pensées se matérialisent, Dangles, 2019,p.141
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