Le désespoir du deuil : une hypothèse qui n’est pas validée par les études

 

Pas de corrélation entre VSCD et désespoir du deuil

« Les recherches ne confirment pas la supposition commune que les VSCD se produisent comme réponse à un état de désespoir de la personne en deuil. LaGrand estime que 99% des contacts ont lieu quand le récepteur est calme, ne pense pas à la personne décédée et vaque à ses activités quotidiennes. Le contact se produit tout à coup, sans raison apparente. Il ne répond pas à une attente mais constitue un élément de surprise. Dans des cas plus rares, les endeuillés prient pour obtenir un signe et, parfois, il se produit effectivement. (1). Haraldsson confirme que les contacts qui se sont produits lorsque les récepteurs étaient tristes ne représentent que 11% des cas ». (2)

La chercheuse suisse Evelyn Elsaesser rejoint cette analyse avec une étude récente : « Les données récoltées montrent clairement que les VSCD ne sont pas obligatoirement liés à un deuil, puisque  27% des sondés n’étaient plus en deuil ou n’ont jamais été en deuil du défunt perçu et que 23% ne pensaient que parfois, rarement, très rarement ou jamais au défunt perçu, ou ne le connaissaient même pas !« (3)

En 1971, le professeur Rees était lui aussi parvenu à la même conclusion en étudiant des veufs et des veuves souffrant de dépression suite au décès de leur conjoint. Ceux-ci n’avaient pas vécu plus d’expériences de communication après la mort que le reste des endeuillés. Il en conclut que « les hallucinations de ce type doivent être considérées comme un phénomène normal » (4). Le professeur en psychologie Bruce Greyson confirme cette analyse. Pour lui, si on fait exception du fait que les endeuillés sont capables de voir, d’entendre, de sentir des personnes décédées, ils n’ont par ailleurs aucun autre signe de pathologie mentale.

 

Des visions au moment-même de la mort

On peut encore ajouter que l’hypothèse hallucinatoire ne peut pas expliquer pourquoi ces visions peuvent apparaître 10, 15, voire même 30 ans après le décès, soit bien après le choc initial du deuil. Elle ne peut pas non plus expliquer comment les visions peuvent parfois se dérouler à la seconde près du décès de la personne. Un décès qui peut avoir lieu à de grandes distances alors que le témoin ignore totalement que la personne observée est morte. (voir aussi expérience perimortem).

C’est ce qu’a témoigné une mère de Newcastle (Australie) sur la radio nationale : « En octobre 1979, je me trouvais avec mon mari et Justin, notre fils de deux ans, dans le nord de l’Angleterre et nous devions retourner en Australie six semaines plus tard. Mon grand-père, qui vivait à 18 miles de nous, avait un cancer, mais sa vie ne paraissait pas en danger immédiat. Le 18 octobre à 9h et demie du matin, mon fils jouait au bas de l’escalier quand je l’ai entendu parler à quelqu’un, puis crier : « Mais je veux, je veux ! » Il est arrivé dans la cuisine, a pris un sac à provisions et a mis dedans son bol, son assiette et son ours. Je lui ai demandé s’il s’en allait, et voici ce qu’il m’a dit : « Grand-papa a dit qu’il s’en va, il dit que c’est bien, à présent, il m’a dit d’être gentil avec maman. Je veux aller avec Grand-papa, mais il ne veut pas m’emmener, il faut que je reste avec maman. ». A 9h40, j’ai eu un coup de téléphone de mon oncle, m’apprenant que mon grand-père était mort dix minutes plus tôt. Justin s’obstinait à dire son histoire, il l’a répétée quand mon mari est revenu du travail. Le lendemain, ma plus proche voisine m’a dit qu’elle avait voulu entrer pour me demander quelque chose, mais qu’en entendant Justin parler à quelqu’un dans le vestibule, elle avait pensé que j’avais une visite et était retournée chez elle – à environ 9h30. » (5)

 

Effets positifs du VSCD

On notera, pour terminer, l’effet positif du VSCD, puisqu’il permet à ceux qui le vivent d’avoir une ouverture à la spiritualité (qui peut aller de pair avec une distanciation par rapport à la religion) et bien souvent une diminution, voire même une disparition, de la peur de la mort. l’enquête menée par Evelyn Elsaesser et ses collègue a ainsi montré que 73% des personnes ayant vécu un VSCD ont affirmé avoir ressenti une guérison émotionnelle. (6)

« La quasi-totalité des participants [au projet de recherche d’Evelyn Elsaesser] sont convaincus de l’authenticité de l’expérience, impliquant qu’il y a une survie du défunt, donc une vie après la mort – seulement 1% d’entre eux n’en étaient pas convaincus », souligne Evelyn Elsaesser. Autre point clé qui découle de la puissance de cette expérience: la spiritualité est fortement renforcée (36% se considéraient comme spirituels avant le VSCD, contre 64% après); ce qui vient modifier profondément le rapport à la mort. A contrario, on constate un faible impact sur la religiosité: 9% se considéraient comme religieux  avant le VSCD, contre 12% après . De même, les croyances prééxistantes  n’ont aucune influence sur la probabilité de survenue des VSCD. » (3)

La sérénité retrouvée suite à un VSCD apparaît dans le témoignage de cette femme envoyé au Dr Pim van Lommel : « Ma mère a été assassinée en 1992. Après de longues souffrances en unité de soins intensifs, elle a succombé. j’en ai été bouleversée et affligée, parce qu’elle avait toujours eu peur de mourir. Cela me tourmentait sans cesse. Un soir, un mois environ après sa mort, je me suis couchée et j’ai prié, demandant dans ma prière d’être rassurée sur le fait que tout allait bien pour elle. Cette nuit-là, j’ai fait un rêve. Et j’ai vécu ce que tellement de gens racontent après une expérience de mort imminente. J’ai traversé une zone d’obscurité et débouché dans la lumière. Il émanait de cette lumière une extraordinaire sensation d’Amour. C’était une lumière aveuglante, brillante, indescriptible. Tellement accueillante, tellement bienfaisante, que je ne voulais plus la quitter. J’ai su que ma mère allait bien, mais que je devais repartir. En me réveillant, je savais que ma mère était dans un monde meilleur et je ressentais une paix profonde. Je sais dans mon cœur qu’il y a quelque chose au-delà de cette vie. » (7)

 

La possibilité d’avancer malgré tout

La théologienne Lytta Basset a elle aussi témoigné combien les manifestations de son fils décédé après un suicide avaient été aidantes: « Il serait malhonnête d’occulter plus longtemps ce qui m’a remise debout. Ce qui m’a ramenée pour de bon du côté des vivants en traçant résolument une frontière entre l’avant et l’après. Ce qui – la blessure étant, depuis lors, bel et bien refermée – m’interdit de prononcer la phrase trop souvent entendue de la bouche de personnes endeuillées d’un enfant: « On ne s’en remet jamais ».

L’omerta sur les relations vivantes qui nous sont données à vivre  avec nos proches disparus aboutit à priver les autres de ce qui pourrait les remettre debout. Va le dire à ton entourage, ne le garde pas pour toi: telle est la recommandation pressante de Jésus aux premiers témoins de l’événement de Pâques… Au point que cela semble faire même partie de leur expérience : cela t’es arrivé pour que tu le partages. » (8)

 

Alexandra Urfer Jungen

 

1. Haraldsson E., « Halluzinationen. Plötzlich hörte ich eine Stimme », Therapiewoche, 44, 32, 1994, p.1865
2. Evelyn Elsaesser-Valarino, « Vécu subjectif de contact avec un défunt » in Manuel clinique des expériences extraordinaires, 2013, p.117
3. Carine Anselme, “Quand nos défunts nous (é)veillent”, Inexploré, N°50, p.98
4. Rees W.D. « The hallucinations of widowhood », British Medical Journal, 4, 1971, p.37-41
5. Elisabeth Kübler Ross, La mort et l’enfant, Editions du Tricorne/ Editions du Rocher, 1986, p. 220
6. Evelyn Elsaesser, Contacts spontanés avec un défunt, une enquête scientifique atteste de la réalité des VSCD, Editions Exergue, 2021, p.43
7. Dr Pim van Lommel, Mort ou pas, les dernières découvertes médicales sur les EMI, InterEditions, 2015, p.286
8. Lytta Basset, Cet Au-delà qui nous fait signe, Albin Michel, 2022, pp 7-15

 

Pour en savoir plus, voir aussi : « L’analyse du VSCD par un psychothérapeute« 

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