« Superstitions moyenâgeuses »
La science semble a priori nous indiquer que la réalité matérielle, visible et mesurable, constitue tout ce qui existe. De ce fait, donner du crédit à ce qui toucherait de près ou de loin au paranormal serait la caractéristique d’un esprit faible, naïf et peu instruit. Évidemment, nous préférons entrer dans la catégorie « intelligent » et « bien connecté à la réalité », plutôt qu’adepte de superstitions moyenâgeuses ! Nous sommes tellement drillés depuis notre plus jeune âge que la plupart d’entre nous avons développé une résistance à croire et même à nous informer sur tout ce qui touche aux phénomènes « Extra-Ordinaires ».
Bâtons dans les roues
Même pour les spécialistes reconnus du paranormal rien n’est aisé. Le professeur de psychologie et chercheur en parapsychologie Charles Tart déplore combien il est difficile de faire de la recherche quand la thématique se situe hors des sentiers battus. Et cela, même si les résultats peuvent être révolutionnaires dans notre compréhension du monde, de la vie et de la mort :
« La parapsychologie scientifique a toujours été une discipline taboue, rejetée, ce qui veut dire que très peu de scientifiques formés y ont travaillé jusqu’à ce jour. Ceux qui s’y consacrent obtiennent peu de financement et ont toutes les peines du monde à partager avec leurs collègues le résultat de leurs travaux, parce que la plupart des journaux du courant dominant sont hostiles à la publication de tout résultat positif en recherche métapsychique. » (1)
Les grands médias ont une approche identique. Ils font trop systématiquement apparaître les chercheurs, pourtant très qualifiés et rigoureux, qui s’intéressent au paranormal comme ayant une approche peu crédible. Au contraire, leurs contradicteurs, n’ayant souvent pas la moindre connaissance des recherches menées dans le domaine, sont présentés comme de hautes références scientifiques. Des sites d’information grand public comme Wikipedia sont dans le même processus.
Le biais du scientisme
Malgré ce que l’on sait de la physique quantique, il est toujours difficile, même aujourd’hui, d’accepter les résultats qui ne correspondent pas à une vision matérialiste du monde. Ce d’autant plus que la plupart des étudiants se voient enseigner cette vision du monde sans savoir que c’est une hypothèse qui n’a jamais fait ses preuves.
Le journaliste Jocelin Morrisson relate dans son ouvrage « La voyance » : « L’un des plus importants articles publié sur la vision à distance est celui qui est paru en 1976 dans la revue à Comité de lecture « Proceedings of the Institute of Electrical and Electronics Engineers ». L’un des relecteurs, contrairement à ses collègues et malgré la pertinence scientifique de l’article a refusé la publication parce que, dit-il : « c’est le genre de choses que je ne pourrais pas croire, même si elles étaient vraies » (2).
On est typiquement dans un cas de dissonance cognitive. L’étude faisait s’écrouler le monde mental de ce scientifique et pour garder intacte sa conception de la réalité, il était forcé de rejeter les résultats qui lui étaient soumis. D’ailleurs, une majorité des scientifiques les plus reconnus se disent athées. Le cas des États-Unis est sans aucun doute transposable aux autres pays occidentaux : « Un article publié dans Nature en 1998 (3) révéla que 93% des scientifiques les plus proéminents et les plus influents aux États-Unis (tous membres de la National Academy of Sciences) se considèrent comme non-religieux et non-spirituels, et rejettent la possibilité d’une après-vie ». (4)
La recherche scientifique est donc clairement biaisée par le scientisme, ce dogme qui n’a rien à envier aux intégrismes religieux. Normalement, la science s’attache à analyser objectivement les faits, mais le scientisme est une forme altérée de la science dans laquelle ses tenants ont une foi absolue dans une vision matérialiste du monde.
Scientisme et science
Comme l’explique le docteur en neurosciences Mario Beauregard : « Les vrais sceptiques mènent des investigations avec un esprit ouvert et objectif, motivés par la recherche de la vérité. Sans préjugés d’aucune sorte, ils privilégient une attitude de questionnement envers les faits et leurs interprétations, et sont prêts à remettre en cause leurs propres croyances. Par contraste, les pseudo-scientifiques sont des croyants, résolus à défendre le matérialisme scientifique. Parce que les phénomènes psi démontrent la fausseté de la vision du monde matérialiste, les pseudo-scientifiques n’ont d’autre option que de rejeter toutes les preuves du psi comme n’étant que des effets mal contrôlés, non-reproductibles ou même frauduleux – et cela quand bien même plusieurs phénomènes psi ont été reproduits des centaines de fois dans des laboratoires indépendants dans le monde entier. En fait, la plupart des pseudo-sceptiques ne cherchent même pas à examiner les preuves ou à conduire des expérimentations […] Comme le biologiste Rupert Sheldrake l’a indiqué, certains de ces pseudo-scientifiques se comportent de la même manière que des fanatiques fondamentalistes qui seraient engagés dans une croisade pour défendre la doctrine matérialiste. Pour ces zélateurs, hors du crédo matérialiste, il n’y a ni science ni rationalité possibles. Puisque l’humilité n’est pas leur fort, ils prétendent savoir ce qui est possible et ce qui ne l’est pas. Encore et encore, ils prennent leur ignorance et leurs croyances limitées sur le fonctionnement de l’univers pour une description complète de la réalité. » (5)
Théorie des paradigmes scientifiques
Le philosophe Thomas Kuhn a modélisé ce mécanisme de rejet de la nouveauté dans sa théorie des paradigmes scientifiques. Il y explique combien il faut de temps pour qu’une nouvelle vision du monde soit admises par l’entièreté de la communauté scientifique et humaine.
Il en a décrypté le processus : une conception de la science est acceptée par tous et devient la base normale de toute la communauté scientifique jusqu’à ce que des anomalies apparaissent dans la théorie. Celles-ci sont prises en compte et étudiées par quelques chercheurs qui essaient de les intégrer à un nouveau modèle. Dans un premier temps, ce nouveau modèle est très fortement combattu par la majorité des scientifiques avant d’être petit à petit adoptée jusqu’à ce qu’il devienne à son tour la nouvelle norme.
Aujourd’hui, les failles du modèle matérialiste sont innombrables, en particulier au vu des incroyables découvertes de la physique quantique. Mais les recherches permettant de valider et expliquer les anomalies découvertes sont encore beaucoup combattues.
L’irrationalité des scientifiques
Mario Beauregard rappelle : « Malheureusement, l’histoire des sciences montre très clairement que tous les scientifiques ne sont pas des modèles en matière d’ouverture d’esprit, d’objectivité et de rationalité, contrairement à ce à quoi on s’attendrait. Par exemple, en 1772, l’Académie des Sciences de France, qui faisait figure d’autorité rationnelle en Europe à l’époque, créa un comité pour examiner les témoignages à propos de « pierres tombant du ciel ». Après avoir examiné quelques témoignages, Antoine Lavoisier, le père de la chimie moderne, et ses collègues conclurent que « les pierres ne peuvent pas tomber du ciel, car il n’y a pas de pierres dans le ciel ! » (6)
La même réaction de refus catégorique devant la nouveauté a été émise par le professeur de mathématique et d’astronomie Simon Newcomb quand on lui a appris que les frères Wright avaient fait leur premier vol en avion. Il avait conclu à une arnaque parce qu’il était impossible de faire voler une machine plus lourde que l’air !
L’inconcevabilité du paranormal
De ce fait, face aux questions paranormales, « on se trouve là, une fois de plus, devant le raisonnement implicite suivant : ce qu’on nous propose est « inconcevable », donc ça n’existe pas, donc les faits qui semblent, à première vue, prouver que ça existe sont faux, qu’il s’agisse de fraude ou d’illusion. Cela ne vaut même pas la peine d’essayer de les vérifier, ce serait perdre son temps. Tout repose donc sur la notion d’« inconcevable ». Ce mot, en fait, signifie simplement un refus absolu de remettre en cause les anciens paradigmes et, éventuellement, d’en changer ». (7)
Le biochimiste Rupert Sheldrake rappelle à quel point l’attitude face au paranormal est hors-norme par rapport aux autres disciplines scientifiques: « On ne voit dans aucune autre discipline de l’aventure scientifique des individus, intelligents par ailleurs, se permettre de proférer en public de telles affirmations fondées sur des préjugés et l’ignorance. Personne ne chercherait à interdire une recherche en chimie, par exemple, alors qu’il ne connaît rien au sujet. Pourtant, dès qu’il s’agit de phénomènes psi, les matérialistes engagés se laissent aller à dédaigner les preuves qu’on leur apporte, se conduisent irrationnellement au nom de la Raison et oublient la science tout en prétendant parler en son nom. » (8).
L’indéniable preuve par témoignage
On peut enfin rappeler que les savoirs se transmettent de diverses manières. La science a mis en avant la preuve scientifique par la reproductibilité des phénomènes, ce qui est souvent plus compliqué lorsqu’on touche au paranormal. Mais la reproductibilité n’est pas impossible dans nombre de domaines « Extra-Ordinaires », comme vous pouvez le voir dans les pages « Les différents phénomènes paranormaux ». Il faut relever cependant que la preuve judiciaire, par exemple, est basée sur les témoignages et, là, nous sommes bien de cet ordre avec les expériences hors-normes, puisque nous avons des millions de témoignages à travers le monde et à travers le temps corroborant ces phénomènes. On peut aussi noter que la mise sur le marché de nombreux médicaments se fait sur la base d’indications favorables de leur efficacité, mais pas de preuve absolue.
Les exigences concernant la validation des phénomènes paranormaux est donc largement supérieure à ce que l’on demande aux autres domaines de la vie courante.
« A présent, il est temps de redonner la priorité aux connaissances dérivées de l’observation et de l’expérimentation. Temps aussi que les neuroscientifiques reconnaissent toutes les données empiriques relatives à la conscience et aux états modifiés de conscience, et pas uniquement celles qui sont compatibles avec leur dogme ». (9)
Alexandra Urfer Jungen