Comment se sent l’enfant qui a des capacités médiumniques ?

Pour les enfants qui peuvent voir des personnes décédées, leur univers ressemble de près à celui du dessin animé « L’étrange pouvoir de Norman » (« ParaNorman » en anglais). Il y a du monde qui circule sans cesse autour d’eux et qui discute avec eux, mais personne d’autre ne peut percevoir ces présences.

Lorsqu’il réalise que sa famille et ses amis ne voient pas la même chose que lui, il peut trouver très difficile d’être différent des autres personnes de son entourage. Il peut avoir honte de ses dons. Il a peur d’être jugé et comme on a tendance à le trouver bizarre, ce qu’il vit devient un secret. Il a tendance à s’éloigner de plus en plus et les relations avec ses camarades peuvent être difficiles.

S’il a des dons de type empathiques, il peut ressentir des douleurs qui ne sont pas les siennes, ainsi que des maux de tête qui peuvent être importants à l’approche des esprits.

Dans son étude auprès des enfants entendeurs de voix, Sandra Escher remarque que la moitié d’entre eux peuvent se sentir menacés du fait d’un ton de voix « désagréable ou agressif ». (1). Cela peut être très effrayant surtout du fait qu’il n’y a pas de maîtrise sur le phénomène, ce qui engendre un sentiment d’impuissance. L’enfant peut être terrifié par ses dons. En tous les cas, le phénomène peut se révéler envahissant et anarchique lorsqu’il n’est pas encore maîtrisé. Le fait de ne pas avoir le contrôle sur ses sensations, ce qu’il voit et entend est très perturbant et, là aussi effrayant.

L ’enfant peut avoir peur… d’être toujours terrifié par les esprits. L’enfant peut se demander s’il lui sera un jour possible de leur faire face sans être terrorisé.

Il se sent très seul. Il n’a la plupart du temps personne avec qui partager ses peurs, parce que personne ne le croit ou alors il pense que personne ne peut le croire. Il aimerait intensément que ses proches puissent voir ce qu’il perçoit.

L’enfant peut se sentir investi d’une mission : il doit apporter son soutien aux esprits qu’il rencontre et qui ne cessent de lui demander de l’aide. Le tourment des « esprits errants » peut contaminer l’enfant, surtout s’il est très empathique. Il peut avoir de la difficulté à faire la différence entre ses émotions et celles qui proviennent d’entités perturbées.

Il lui est compliqué d’aller dormir, même s’il n’a pas peur. Il entend des voix, parfois très insistantes, qui l’empêchent de trouver le sommeil. Des objets peuvent aussi bouger, ou tinter, les couvertures être tirées, il peut se sentir poussé. Autant d’éléments qui perturbent le repos. Il peut être épuisé du fait d’être constamment harcelé de présences autour de lui.

L’enfant peut se sentir trahi lorsqu’il est accusé à tort de faire du bruit, de laisser les lumières allumées ou d’avoir caché des objets.

A partir d’un certain âge (souvent autour de 10 ans), l’enfant va faire semblant de ne pas voir les esprits. Il va mettre en place des stratégies pour pouvoir répondre aux entités qui viennent le questionner sans passer pour un fou ou une folle. Par exemple. Il va se mettre à l’écart, hors de vue, pour discuter tranquillement, mais plus souvent il va faire semblant de parler dans son téléphone portable.

A l’école, il lui est difficile de suivre l’enseignement du professeur. Il y a souvent un esprit qui vient lui parler en classe, qui va se mettre devant lui, déplacer certains objets ou alors faire des pitreries. Les voix qu’il perçoit peuvent être plus fortes que celle de l’enseignant. La scolarité est de ce fait difficile, ce d’autant plus que ses camarades le classent tout de suite comme étant une personne aliénée.

Alexandra Urfer Jungen

Sandra Escher et al., « Independent course of childhood auditory hallucination : a sequential 3-year follow-up study », British Journal of Psychiatry, n°181 (suppl.43), 2002, p. s10- s18

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