Un phénomène répandu
“Il n’existe aucun article scientifique, aucune monographie sur le sujet, car le tabou sur la possibilité de contact avec la conscience (non locale) de défunts est tel que ces expériences ne sont pratiquement jamais mentionnées, même à des parents proches. Toutefois, dans l’enquête européenne sur les valeurs effectuée entre 1980 et 1983 par des chercheurs à l’Université de Tilburg en Hollande, il était demandé aux personnes interrogées anonymement si elles avaient déjà eu la sensation d’être en contact avec une personne décédée (1). En Europe, 25% des personnes interrogées (125 millions) ont répondu oui, alors qu’aux Etats-Unis, elles étaient 30% (100 millions)(2)… Une recherche sur les expériences post-mortem de veuves et de veufs a révélé un pourcentage de contact avec (la conscience de) leurs partenaires décédés d’environ 50% (3). Et chez les parents ayant perdu un enfant (4, les chances de contact avec (la conscience de) leur enfant mort atteignait 75%. ” (5)
Aujourd’hui, on parle plus de 50% à 60% de la population touchée par ce phénomène (6). Les recherches montrent qu’à peu près autant d’hommes que de femmes vivent des vécus subjectifs de contacts avec les défunts. Par contre, les femmes en parlent plus. Elles sont peut-être plus à l’aise que leurs homologues masculins pour partager leur expérience particulière.
Malgré leur nombre conséquent, ceux qui les vivent se posent souvent cette question : “Est-ce que c’est moi qui imagine ? Est-ce que le deuil me fait perdre la tête ?” Ils ne sont pas aidés par la culture occidentale pour qui ces phénomènes n’existent pas. Conséquence: la plupart des personnes vivant des VSCD n’en parle pas de crainte de passer pour folles. Les endeuillés peuvent ainsi être particulièrement démunis face à ces expériences hors-normes.
Entre deux et quatre contacts avec le défunt
Le professeur américain associé du Neumann College à Aston, James A.Houck, a noté dans son enquête que les endeuillés vivent généralement entre deux et quatre contacts avec leurs défunts (voire plusieurs défunts) et que ce sont… les proches décédés qui initient la relation ! Dans la majorité des cas, l’objectif est d’aider les vivants à gérer leur deuil en prouvant que les morts continuent à exister ailleurs.
Il n’y a aucune spécificité de sexe, de niveau social, d’instruction, de nationalité ou de religion concernant les personnes vivant un VSCD. On notera cependant que les personnes décédées de mort violente apparaissent plus souvent à leurs proches. Les parents qui ont perdu un enfant sont aussi plus nombreux que la moyenne à vivre ce phénomène.
La chercheuse suisse Evelyn Elsaesser confirme cette analyse. “Même s’il n’est pas forcément nécessaire d’être en deuil ni même de connaître le défunt pour vivre un VSCD, le lien émotionnel “proche et aimant “entre les récepteurs et les défunts perçus reste un facteur clé dans la survenue de ce contact entre les mondes. L’étude précise que 85% ont ainsi immédiatement et sans hésitation reconnu le défunt perçu. “Sans surprise, il s’agit majoritairement de membres de la famille, de conjoints, partenaires...” (7)
Le VSCD chez les enfants
Les enfants sont pour leur part très enclins à avoir un VSCD. Les visions concernent le plus souvent un proche décédé qui va être vu et/ou entendu peu après sa mort. Ces apparitions ne vont pas forcément s’exprimer oralement, mais leur vision est généralement interprétée comme un « Tout va bien. Ne t’inquiète pas. Je continue à veiller sur toi ».
Cela a été le cas d’un adolescent de 15 ans qui m’a raconté ce qu’il avait vécu un an plus tôt à la mort de son grand-père dont il était très proche. Le lendemain du décès, il a clairement vu apparaître trois ombres au pied de son lit : son grand-père, son oncle (lui aussi décédé quelques temps avant le grand-père) et son « petit frère », décédé avant sa naissance. Il s’étonnait encore au moment où il m’a fait son témoignage de ne pas avoir eu peur. Il n’y a pas eu de message, ni de paroles échangées, mais cette vision a rassuré l’adolescent en lui rappelant que les membres décédés de sa famille étaient réunis et que tous gardaient un œil sur lui.
La grande difficulté pour les enfants vivant ce phénomène est de pouvoir raconter ce qu’ils ont vécu car trop souvent confrontés à l’incrédulité des adultes. Ils se retrouvent donc seuls pour donner du sens à leur VSCD. Cependant, ces expériences hors-normes vont souvent transformer les plus jeunes: « Hart (2003) et Lawson (8) constatent que ces expériences tendent à modifier la vision du monde de ces enfants, à influencer les choix qu’ils feront plus tard dans leur vie et à leur procurer une profonde révérence de la vie.» (9)
Alexandra Urfer Jungen