L’origine de l’objet
La tunique de Guadalupe appartenait à un indien aztèque né en 1474 du nom de Cuauhtlatoatzin (« celui qui parle en aigle » en langue nahuatl). L’homme a été rebaptisé Juan Diego suite à sa conversion au catholicisme en 1524 ou 1525. Il a eu la caractéristique d’observer les 9 et 12 décembre 1531 une présence féminine qui lui a dit s’appeler « Notre Dame de Guadalupe ».
Lors de ses apparitions, la femme a demandé à l’Indien d’aller auprès de Mgr Zumarraga, qui était alors en place à l’évêché de Mexico, avec une demande spéciale : qu’on lui construise une chapelle sur la colline de Tepeyac. L’homme, bien emprunté par cette demande, lui a expliqué que son statut ne lui permettrait jamais de rencontrer l’évêque. Mais, le 12 décembre, la Dame propose au jeune homme d’emporter avec lui un petit cadeau : des superbes roses rouges « sevillana » miraculeusement présentes alors qu’on est en hiver. Cuauhtlatoatzin les ramasse, en remplit sa tunique, et grâce à ce présent se voit offrir une audience auprès de Mgr Zumarraga, grand amateur de roses. Alors que l’Indien ouvre sa tunique, pour offrir les fleurs, le prélat tombe à genoux : une image de la Vierge Marie est imprimée sur le vêtement traditionnel appelé une «tilma».
Le tissu indestructible
La tunique existe toujours et est exposée de nos jours à la basilique de Guadalupe. Étonnamment, elle est en parfait état de conservation. Rien que cela relève déjà du miracle, puisque la tilma est fabriquée en fibres d’agave. Un tel vêtement est si fragile qu’il ne dure pas au-delà d’une vingtaine d’années. Dans notre cas, elle a survécu en parfait état de conservation pendant plus de 500 ans, alors que, durant plus d’un siècle, il n’y a même pas eu de vitre de protection. Les bactéries, les doigts et les baisers des fidèles, la fumée des cierges, rien n’a entamé le tissu! Pas même de l’acide utilisé pour nettoyer le cadre qui lui est tombé par mégarde dessus en 1791, le tissu jauni se régénérant en quelques années.
Plus encore : le 14 novembre 1921, une bombe a explosé directement sous la tilma. Cadre et tissu sont restés intacts, alors que l’explosion a soufflé les vitres de la basilique, ainsi que celles de nombreuses habitations des alentours. Même l’autel en marbre a volé en éclat !
Comme une photo
L’impression de l’image est également étonnante, puisqu’il s’agit d’un recto-verso qui ne laisse aucunement apparaître de la peinture, mais un phénomène qui ressemble plutôt à ce qui se passerait avec une pellicule photographique. Les couleurs obtenues ont été analysées en 1936 par le biochimiste austro-allemand Richard Kuhn (qui obtiendra la Prix Nobel de chimie en 1938). Le scientifique a conclu que les couleurs n’étaient ni minérales, ni animales, ni végétales. Ce qu’a confirmé plus de 40 ans plus tard, en 1976 un expert en peinture, le biophysicien Philip S. Callahan de l’Université de Floride qui a annoncé l’origine inconnue des pigments utilisés.
Une cartographie céleste
Le Pr Juan Homero, docteur en astronomie, s’est pour sa part intéressé de près aux représentations d’étoiles que l’on trouve sur le manteau de la Vierge. Et là, étonnement : il s’agit en fait d’une véritable cartographie céleste . Et pas n’importe laquelle : celle que l’on retrouve à la hauteur de Mexico le 12 décembre 1531 à 10h26, le moment même où s’est formé l’image sur la Tilma de Cuauhtlatoatzin. « Plus précisément, on se trouve devant une projection directe du ciel sur l’étoffe, où la position des étoiles est inversée gauche/droite. La voûte céleste étant une surface courbe, elle s’inscrit sur l’étoffe plane selon les principes de l’anamorphose, qui ne seront définis qu’au XVIIIe siècle. » (1)
Des yeux vivants
Encore plus étonnant les yeux de la Dame sur la tilma réagissent comme ceux d’un être vivant. Le premier à l’avoir notifié est le chirurgien ophtalmologue Dr Rafael Torija Lavoignet en 1956 : « Quand on dirige la lumière de l’ophtalmoscope sur la pupille de l’image de la Vierge, on voit briller sur le cercle externe le même reflet lumineux que sur l’œil humain. Et par suite de ce reflet, la pupille s’illumine de façon diffuse en donnant l’impression de relief en creux » (2)
« La même année, son confrère Javier Toruella Bueno, réalisant un fond de l’œil -examen destiné à étudier les structuires à l’arrière du cristallin, notamment la rétine – va jusqu’à dire que « l’œil de la Vierge réagit » : la pupille se ferme quand il approche la lumière et se dilate à nouveau quand il l’éloigne. (3)
Nouveau coup de théâtre en 1958. Lors d’examens plus poussés, voilà qu’on trouve dans les yeux plusieurs reflets de silhouettes et de visages, qui semblent être ceux des témoins de l’apparition : l’évêque de Mexico et son entourage. Phénomène formellement attesté en 1975 par les ophtalmologues Amado Kuri, Eduardo Alvarez, José Ahued, et confirmé l’année suivante par Enrique Graue, directeur de l’Institut mexicain d’ophtalmologie.
Effectués en 1980 par le Dr J.A.Tonsmann, au moyen d’appareils qu’utilise la NASA pour traiter les photos transmises par satellites, les agrandissements au microdensitomètre étayant cette découverte sont saisissants. (4) Comme dans un œil normal, la scène que le sujet est en train de voir se reflète trois fois : sur la cornée, puis sur la surface antérieure du cristallin, à l’envers, puis de nouveau à l’endroit sur la surface postérieure du même cristallin. Un tel phénomène optique s’appelle la loi de Purkinje-Samson. Elle n’a été définie qu’en 1832.
Compte tenu des déformations liées à l’angle de vision, les personnages présents dans chacun des yeux se trouvent en situation correspondante, occupant les mêmes positions relatives. Problème : Juan Diego figure parmi eux, déployant sa tunique devant l’évêque, ce qui sous-entend que le point de vue est situé en face. Comme si la Vierge contemplait son image en train d’apparaître, tout en transmettant ces informations oculaires au regard imprimé sur l’étoffe. …
Et les découvertes ne s’arrêtent pas là : en 1991, une équipe d’ophtalmologue dirigée par le Dr Jorge Escalante Padilla (5) constate, sur les paupières et la cornée de l’image, « la présence d’un réseau veineux normal, microscopique, parfaitement visible. » (6)
Notre Dame de Guadalupe apparaît donc comme un objet impossible qui semble toucher en particulier notre temps, puisque toutes les découvertes les plus surprenantes ne sont compréhensibles qu’avec les développements des technologies et savoirs scientifiques actuels.
Alexandra Urfer Jungen
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Didier van Cauwelaert, l’insolence des miracles, Plon, 2023, p.81
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Jody Brant Smith, The Image of Guadalupe, Myth ou Miracle?, Double-day, New York, 1983
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Francisco Anson, Guadalupe: lo que dicen sus ojos, Editiones Rialp, Madrid, 1988
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Dr J.A.Tonsmann, Los Ojos de la Virgen de Guadalupe, Diana Editorial, Mexico, 1981
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Dr Jorge Escalante Padilla, « Los ojos de la imagen de la Virgen de Guadalupe », in Historia (colleccion II), Centro de estudios guadalupanos
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Didier van Cauwelaert, l’insolence des miracles, Plon, 2023, pp77-79