L'APPEL DU LARGE
Un petit bol d'air dans nos croyances
AccueilLes AppelésLes yeux tournés vers le CielNouvelles perspectivesSur la frontièreSous le clocherMes Ti trucsIl était une fois...AutoportraitPour me contacterBlogOu suis-je ?

Réincarnation? Récit d'une vie à NY
Réincarnation? Récit d'une vie à NY


Réincarnation ou pas ? A vous de juger en lisant le récit ci-dessous. Pour notre part, pris au dépourvu par cet étonnant témoignage d’enfant qui nous a été fait directement, nous avons décidé de l’envoyer à l’Inrees (Paris). La journaliste
Miriam Gablier, auteure de l’ouvrage « Réincarnation, enquête aux frontières de la mémoire » paru en septembre 2014, a tout de suite dit son intérêt pour ce cas et a suggéré en parallèle de prendre contact avec le professeur américain Jim Tucker qui mène des enquêtes à travers le monde sur les souvenirs d’existences antérieures qu’ont certains enfants. A la lecture du récit que nous lui avons transmis le 19 octobre dernier, ce spécialiste mondial de la question a fait part de son intérêt dans un courrier du 21 octobre. Il mène désormais l’enquête. Nous espérons savoir bientôt si tout cela est bien réel ou simplement une histoire qui a parasité, pour une obscure raison, une jeune adolescente.

  

 

Récit d’une vie et d’une mort à New York City

 

Il y a parfois une image, un lieu, un récit qui suscitent des émotions étranges. Ou alors, Dieu sait comment ou pourquoi, sans raison aucune, des souvenirs d’un ailleurs et d’un autre temps affluent. Tout cela est généralement furtif. De simples impressions sans nom qui expliquent parfois une attirance pour un hobby, une faculté au-delà de la moyenne ou au contraire des peurs inexpliquées.

Est-ce qu’on peut capter dans certaines conditions l’existence de quelqu’un d’autre ? Quelqu’un qui a vécu dans un autre pays et en d’autres temps ? Est-ce qu’il existe une mémoire universelle à laquelle nous pourrions avoir accès comme l’imaginait Gustav Jung ? Ou alors notre âme chemine-t-elle à travers le temps et l’espace dans un processus de mort et de réincarnation comme on le croit en Orient ?

La question la plupart du temps ne se pose pas réellement. Trop pris par les urgences de la vie et par le train-train, difficile de porter une réelle attention à des sensations étrangères. Et puis un jour, un proche, famille un voisin, vous bouscule. C’est souvent un enfant : « Tu sais avant j’étais … », « Avant quoi ? », « Avant de naître dans ma famille ».

La grande majorité des adultes ferment leur porte à ces récits, les mettant sur le compte d’une imagination débordante quand ils ne grondent pas les enfants en les intimant de stopper immédiatement leurs mensonges.

Cette porte, nous, nous ne l’avons jamais fermée, sans pour autant l’ouvrir non plus. Nous sommes seulement restés disponibles, car des enfant qui ont des choses à raconter, il y en a beaucoup.

On dit que les souvenirs s’estompent avec l’âge. Cela n’a pas été le cas ici. La force du souvenir, si c’en est bien un, prend de l’ampleur avec les années, tant et si bien que cela déborde dans la vie. On découvre un enfant déchiré d’avoir dû abandonner ses proches, ses parents, ses amis, sa famille. Une adolescente pas encore pubère qui pleure son mari et sa fille avec la conviction inébranlable qu’elle a un jour été la femme et la mère. Jusqu’au fond de ses tripes, elle sait avoir été cette personne qui vivait ailleurs, il y a moins de deux décennies en arrière.

Que faire d’autre que de l’accompagner ? Que ses souvenirs soient réels ou non, la souffrance est là, bien présente. La culpabilité d’avoir été forcée par la mort d’abandonner ses proches reste pour elle d’une intensité parfois insoutenable.

Le fait de se transformer en femme réactive-t-elle des mémoires et des émotions oubliées jusqu’alors ? Depuis longtemps, cette jeune ado disait bien qu’avant elle était « anglaise » (sous-entendu, elle parlait l’anglais), qu’elle est morte à 28 ans et qu’elle laissait, à son âme défendante, un mari aimé et la plus jolie des petites filles de 5 ans. Et là, soudain, en même temps que le corps se transforme, les souvenirs surgissent comme un tsunami avec une force de détails qui interroge : et si c’était vrai ? Si cette vie d’une autre était bien la sienne ? Le récit semble tellement crédible. Histoire banale d’une femme ordinaire morte dans un stupide accident. Tout semble tenir.

Nous sommes en mai 2001 à New York City. Le crépuscule tombe. La femme rentre du travail alors que la nuit commence à tomber. C’est une femme plutôt jolie. Elle est caucasienne, de taille moyenne, avec de longs cheveux châtain foncé et des yeux bleus En dehors des grandes occasions, elle ne se maquille jamais, mis à part le gloss transparent qui illumine ses lèvres. Elle est heureuse et détendue. Nous sommes vendredi soir. C’est le week-end qui commence. Elle fait un bout de route avec sa collègue de travail à la peau basanée qui a les cheveux tirés dans un chignon serré. Elles se saluent et la femme hâte le pas, pressée de rejoindre John, son mari, et sa petite fille de cinq ans qui lui ressemble tellement, exception faite de ses taches de rousseur qui ajoutent à la gamine un air si charmant.

Dans quelques minutes, la femme sera à la maison. Elle avance sur le passage piéton. Un mouvement attire son regard sur la gauche. Un break bleu arrive à tombeau ouvert. L’homme dans la quarantaine aux cheveux grisonnants sur les tempes ne freine même pas en la voyant. Elle est heurtée de plein fouet. Le conducteur ne ralentit pas. Il continue sa route, la laissant là, grièvement blessée à la tête et une multitude d’os cassés sur tout le corps. Les médecins feront leur possible, mais les blessures sont trop graves. Elle décède à l’hôpital. Elle a alors 28 ans.

Elle repose désormais dans un cercueil noir avec des poignées dorées. Beaucoup de monde a fait le déplacement au service funèbre. Sa famille, mais aussi ses amis, des amis de son mari qu’elle connaissait bien et presque tous ses collègues de travail.

Sa mère dépose la broche de la grand-mère, elle aussi décédée, sur le cercueil avant l’ensevelissement. Une broche en forme de croix avec des incrustations en pierreries. La grand-mère portait toujours cette broche de son vivant. Un cadeau de son mari.

Le cercueil est recouvert de terre et une pierre tombale est installée. Elle est de couleur grise avec une croix sur le dessus qui comporte des bandes dorées et argentées. Des anges sont gravés de chaque côté de la pierre tombale comme pour appuyer le lancinant message qui y est inscrit : « Pourquoi es-tu partie ? ». A côté, il y a une autre tombe sur laquelle on peut lire le nom d’Elena.

 

Viennent alors les souvenirs de toute cette autre vie. Une enfance passée en périphérie de la ville de New-York dans une maison aux murs orangés, aux tuiles rosées et aux grandes baies vitrées. Un lieu retiré, au milieu des champs et pourtant à quelques minutes de l’arrêt de bus. Dans un coin de jardin, il y avait plusieurs chaises longues, le lieu privilégié pour rester le soir en famille et observer le ciel. Cette maison était un îlot où, même adulte, la femme se rendait à chacun de ses anniversaires.

Petite, elle avait un chien du nom de Snooki. Un Malamute noir, blanc et gris aux yeux bleus qui adorait courir après les frisbees. Il courait au fond du jardin même lorsque la gamine faisait semblant de lancer le frisbee. Ce chien était « foufou ».

Elle a suivi des cours de dessin vers l’âge de 5 ou 6 ans, puis elle a fait de la gymnastique artistique entre 9 et 12 ans. Les souvenirs de poutre restent encore gravés dans sa mémoire. Sa meilleure amie, plus grande qu’elle de 10-15cm, en faisait aussi et était très douée dans le domaine.

Son père, fumeur, est décédé d’un cancer lorsqu’elle avait 12 ans. Il avait beaucoup d’humour et se mettait souvent sur sa chaise à bascule préférée pour fumer.

Sa mère adorait jardiner. Chaque saison, elle plantait de très grandes quantités de fleurs.

Sa grand-mère avait des cheveux gris bouclés et coupés courts. C’était une femme qui était petite (elle arrivait à la poitrine de sa petite-fille lorsque celle-ci était adulte). Elle portait toujours sur ses habits la broche que son mari lui avait offerte et elle était très croyante. Elle se mettait tous les jours sur un grand fauteuil pour boire le thé.

Souvenirs d’adultes ensuite. Son mari s’appelait John. Il avait 31 ans au moment du décès. De type caucasien, il portait en permanence une barbe de trois jours. Peut-être un mécanicien sur voiture. Il jouait de la guitare électrique. Il avait peu de contacts avec ses parents (il ne les aimait pas). Il avait aussi une grande sœur à la peau café au lait (adoptée ?) qui avait, pour sa part, de bons contacts avec la famille de ma fille.

Après son mariage, la lune de miel a été fêtée au bord de l’océan dans un autre pays.

Sa fille avait 5 ans au moment du décès. Elle avait comme sa mère les cheveux châtain foncé, des yeux bleus et, en prime, des taches de rousseur. Elle est née un 5 avril. Elle aimait bien voir les chevaux dans le pré chez sa grand-mère maternelle. Elle avait une grosse peluche bleue en forme de lapin qui s’appelait Boody et qu’elle emmenait partout.

La petite famille avait un chat tigré-roux qui s’appelait Wider.

La femme, sa fille et son mari vivaient dans un grand appartement qui était un héritage, probablement dans la région Brooklyn/Maspeth. Il avait appartenu aux grands-parents de la femme, un couple qui était aisé. Quand les grands-parents sont décédés, l’appartement lui a été offert.  

L’appartement avait des portes coulissantes transparentes. Il avait une cheminée, une très grande cuisine et une immense pièce avec deux pianos. Dans la salle-de-bain, il y avait une très grande baignoire avec un fond plat où se trouvaient incrustées des sortes de mosaïques de divers tons de bleus. Le carrelage sur les murs était bleu clair. Il y avait un palmier à côté de la baignoire.

Dans une autre pièce, il y avait une grande vitre au plafond. C’est l’endroit que la femme préférait, mais pas autant que sa propre fille qui était tout le temps à cette place.

La femme travaillait dans le domaine informatique à un poste administratif. Elle exerçait dans un open space. Même si l’emploi était alimentaire, elle avait la chance de vivre en équipe soudée avec ses collègues. C’était d’ailleurs un challenge pour tous : peu aimaient leur travail, mais ils avaient décidé de s’accrocher pour rester ensemble.

Mais ce que la femme préférait, c’était de donner des cours de piano. Bien plus pour le plaisir que pour l’argent des leçons. Elle avait d’ailleurs chez elle un piano droit et, surtout, un piano à queue qui était un héritage familial. Elle apprenait à sa fille à faire du piano.

Catholique pratiquante, elle se rendait à pied tous les quinze jours à l’Eglise pour aller se confesser. Pour elle, c’était important d’aller à l’Eglise, car c’était un moyen de communiquer avec ses grands-parents et son père décédés (elle avait l’impression : « Veuillez laisser votre message après le bip sonore », lorsqu’elle allait à l’Eglise pour parler avec ses proches décédés).

Elle aimait beaucoup le film « Titanic » et les bottines à talons qui remontaient jusqu’aux genoux.

 

L’accident et la mort qui a suivi a été vécu comme une très mauvaise surprise. Un terrible coup du sort. La femme ne pensait pas décéder aussi jeune. Même maintenant, la jeune ado revoit souvent l’accident dans ses souvenirs. Mais le pire a sans doute été pour la femme de voir ses proches anéantis par son décès. Elle restait en permanence auprès d’eux, leur soufflant un « je suis là ». Sa fille pouvait parfois l’apercevoir, essentiellement le soir. Sa mère et son mari pouvait de temps à autre ressentir sa présence, mais rien de plus. C’était trop douloureux de les voir ainsi. Son impuissance lui pesait, alors elle a demandé à pouvoir se réincarner très vite. Elle voulait tourner la page, mais, en même temps, elle gardait l’espoir de pouvoir revoir à nouveau son mari et sa fille en étant à nouveau dans un autre corps de chair.

On lui a alors présenté un tout petit choix de familles pour se réincarner. A son très grand regret, il n’y en avait aucune aux Etats-Unis : elle n’avait pas le droit. Elle a choisi finalement de venir en Suisse, car il y avait quatre saisons dans ce pays et elle savait qu’on la croirait si elle se rappelait de quelque chose. Dans le choix de familles qui lui a alors été donné, il y avait aussi des parents dans le grand nord (eskimo ou équivalent) et d’autres en France.

La jeune ado murmure en disant qu’elle triche. Elle triche, parce qu’elle n’est pas supposée se rappeler de son autre vie durant cette vie-ci. Alors elle a passé un accord. Oui, elle peut se souvenir, oui, elle peut rechercher son mari et sa fille. Oui, mais elle devra accepter quelque chose d’autre en échange. Quoi ? « Je n’ai pas le droit de le dire ». Elle garde bouche-close, mais on sait à son regard qui prend une profondeur d’adulte que c’est important. Nous ne chercherons pas à lui faire violer son pacte.

Ce que nous pouvons en tous les cas constater, c’est que pour la jeune ado, il n’y a pas le moindre doute possible : ces souvenirs sont bien ceux d’une vie antérieure. Pourquoi ?« Parce que dans mes souvenirs, répète-t-elle, je ne me vois jamais en entier, sauf quand je me regarde dans le miroir. Je vois les personnes en face de moi lorsque je les observe et que je leur parle ».

Il ne reste désormais à la jeune ado qu’un seul rêve : revoir ceux qui, peut-être une fois, ont été son mari, sa fille, ainsi que sa mère si celle-ci est encore vivante. Les revoir pour leur dire enfin de vive voix que jamais, jamais, elle ne les a abandonné et qu’elle aura tout fait, par-delà la vie et la mort pour les retrouver.

 

Alexandra Urfer Jungen, octobre 2014



AccueilLes AppelésLes yeux tournés vers le CielNouvelles perspectivesSur la frontièreSous le clocherMes Ti trucsIl était une fois...AutoportraitPour me contacterBlogOu suis-je ?